23.04.2010
Coup de coeur : l'épave d'une patera

Je publie en cette note « coup de cœur » ces images d'une épave échouée au Cap Sim que vient de m'envoyer mon ami Hervé Decker, que j'ai connu a Essaouira dans les années quatre-vingt lorsque je rédigeais mon livre d'Histoire sur la ville.
Il s'agit en fait d'une patera marocaine - elle porte le nom de Sidi Mogdoul en arabe!- échouée sur les rivages Andalous de Tarifa, comme vient de me le préciser Hervé par un nouveau message :
" Salut mon cher,
Je t'ai fait parvenir la photo de cette barque de pêche devenue "patera " du côté espagnol, c'est un témoignage
Cette épave est a Tarifa en face de Tanger sur la cote espagnole, ce en quoi elle est d'un intérêt certain.
Je suis a l'aéroport de bristol UK et j'attends un avion pour Malaga, pour rentrer ce soir sur l'Espagne. :
Je devrais faire un tour a Essaouira très bientôt : bon courage !
Précédemment il nous avait écrit :
" Salut à toi Mana,
Bloqué en terre Anglaise, je consulte ton journal toujours avec grand plaisir. Je te signale que le chercheur Desanges rapporte une observation d'Elien qui peut être rapprochée de celle de Pline selon laquelle « les lions comprennent la langue des Maures » (Desanges : "Le témoignage masqué sur Juba II et les troubles de Gétulie" ).
Peut - on rapprocher ce texte de la tradition qui accorderait à Sidi Mogdoul la vertu d'avoir parlé a un lion et sauvé la ville ?
J'ai récupéré les bancs de cette épave pour les mettre dans le jardin de ma maison de compagne en faisant un rapprochement avec ton texte déjà ancien sur Cap Sim .... Tes photos sur les mouettes et les figures d'Essaouira m'ont incité à commencer la constitution d'une liste que j'intitule « Ceux de Mogador ». Elle trouve son origine dans la documentation que j'ai consultée à ce sujet depuis fort longtemps. A l époque il n'y avait pas encore Internet ni de portable comme tu t'en souviens ....elle reste a compléter .
Continue, nous comptons sur toi cher Mana.
Ton ami de Mogador : Hervé Decker

C'est vraiment curieux que cette patera échouée sur les rivages Espagnols porte lisiblement en arabe le nom de "Sidi Mogdoul" !
C'est mon ami Hervé qui le premier m'avait signalé et fourni la correspondance de Louis Chénier, consul de France auprès de Mohamed III et père du grand poète du même nom .
En prologue à mon livre d'Histoire de la ville j'avais alors mis en exergue sa citation suivante en date du 15 décembre 1769 :
« L'Empereur est arrivé à Mogador au commencement du mois passé. Il a vu avec toute la tendresse d'un auteur la ville dont il a posé lui-même les fondements. Il a fait établir une batterie respectable a l'entrée du port et fait réparer tant bien que mal quelques fortifications, que le temps avait déjà dégradées. Sa Majesté doit partir a la fin de ce mois pour retourner a Maroc. »
Comme le soulignait Louis Chénier, la ville n'a pas émergée lentement des méandres du Moyen Age : elle est née de la volonté du Prince. On appelait alors Marrakech « Maroc » et Essaouira devait être son avant-port. En effet, pour marquer son désir de faire de Essaouira le principal port sur l'Océan, Sidi Mohamed Ben Abdellah commença par bâtir un mur sur les rochers au bord de l'eau. Il fit inscrire la bénédiction du Prophète en lettres coufiques sur la pierre de taille arrachée au flanc de cette île, qui n'est rattachée au continent que par une lagune.

Hervé Decker est un authentique amoureux de Mogador, un oiseau migrateur qui revient périodiquement sur cette île exactement comme les faucons d'Éléonore qui traversent tout l'espace de l'océan qui sépare les îles Britanniques des îles pupuraires de Mogador pour venir y nicher à chaque mois d'avril.
C'est le marin dans l'âme, qui s'occupait alors de la restauration de l'actuelle 'Villa Maroc' que l'Anglais James venait d'acquérir auprès de Jrayfia avant son départ définitif pour Agadir, où celle-ci allait mourir de chagrin : dans les années cinquante sa maison close abritait les plus belles filles du Maroc aux bons plaisirs des Pachas de l'époque et, dit-on ,Orson Welles en personne y venait se délasser de ses fastidieuses journées de tournage d'Othello.
Decker a toujours été convaincu que si on effectuait des plongées sous marines dans la baie de Sidi Mogdoul, on y découvrirait quelques antiques épaves. Une île aux trésors donc !
Il ne croyait pas si bien dire le bon Decker : tout récemment dans les parages du rocher dit « Taffa ou Gharrabou » (l'abri de la pirogue, en berbère), des marins ont pris dans leurs filets deux magnifiques amphores antiques intactes recouvertes seulement de coquillages et d'algues !
Article par Abdelkader Mana
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